Hic sunt dracones (2023)

1/ La grise, la triste, l'horrible

Ville sans couleur

ville sans paysage

tristesse anthropophage des moteurs

se déploie sans pudeur

un ciel inaccessible

la grise, la triste, l'horrible

la grise, la triste, l'horrible

Ville sans lumière

d'un gris impénétrable

le vent inconsolable du désert

figés par la moiteur

les yeux cherchent une cible

la grise, la triste, l'horrible

la grise, la triste, l'horrible

Ville sans relief

sous son brouillard de sable

dissimulant le fief de quelques notables

tandis qu'à moins d'une heure

la route redevient piste

l'horrible, la grise, la triste

l'horrible, la grise, la triste

Mais tu aimas Lima

tu aimas Flora de Miraflores

ce vent qui t'élima

c'est tout ce qu'il te reste

c'est tout ce qu'il te reste

Ville sans soleil

que la poussière éventre

éclipse permanente ciel de migraine

ô sinistres douleurs

que les hommes construisent

la triste, l'horrible, la grise

la triste, l'horrible, la grise

Mais tu aimas Lima

tu aimas Flora de Miraflores

ce vent qui t'élima

c'est tout ce qu'il te reste

c'est tout ce qu'il te reste

(Pérou, Equateur, France, juillet-août 2017/avril 2019)

2/ Abscisses désordonnées

Au milieu de terres sans nom

m'a conduit le GPS

terres boueuses, désolées

j'ai mal lu les coordonnées


La lande est farcie de ferraille

un désordre satirique

clonage des temps titaniques

mutée version périurbaine

Monochrome à force du silence

assourdissant des couloirs aériens

monochrome à des lieues de distance

& déprimant, un peu

you might need a cuppa

Au fond des abysses des hommes

m'a mené le satellite

saturé de mélancolie

j'ai raccroché mon DND

Monochrome aux environs bachiques

ahurissant des terres ébréchées

monochrome, en béton soviétique

& déprimant, un peu

you might need a cuppa

Monochrome à force du silence

assourdissant des couloirs aériens

monochrome à des lieues de distance

& déprimant, un peu

you might need a cuppa

(Paris/Manchester, 17/18 février 2018)

3/ Mare congelatum (Der Wanderer)

S'il s'agit d'explorer

tout ce que compte la terre

de monts & de forêts

d'océans, de déserts

S'il s'agit d'entrevoir

jusqu'au moindre détail

lever de Mars un soir

bord de l'ultime faille

Alors j'avance

là où la mer se fige

j'aspire à plein vertige

le froid & le silence

Alors je traîne

mafièvre albumineuse

au sein de nébuleuses

blanches & sereines

S'il s'agit d'admirer

l'or & le boréal

sans se laisser troubler

par le temps qui dévale

S'il s'agit d'engloutir

jusqu'à en exsuder

le vent qu'on voit gémir

sur le marbre glacé

Alors sans peur

sans songer au frisson

l'étendard nous hissons

de l'âpre Wanderer

Alors j'étrenne

la pelisse ordinaire

d'un Ulysse polaire

- ma peau de renne

La mer a englouti le jour

(Meaux-Paris, 15 novembre ; Boissy, 27 novembre 2016)

4/ Mythologie vinyle

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

Ending credits

au creux des tympans hurlent les violons

parodie de silence à l'unisson

symphonie peroxydée sous blast beats

Peur de l'abîme

orchestrer le vide à coups d'harmonie

ficeler de noeuds comme fait son nid

sans cesser de pépier la voix des rimes

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

Presser random

le souvenir ¡ clac ! saphir qui se lève

brillance absolue, noire, de nos rêves

éveil toujours précoce, féroce comme

premières neiges

un froid qui cisaille aux lueurs de l'aube

ce moment où le jour agoraphobe

après "A venture", "Perpetual change"

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc

A la fin des chansons

le bruit blanc le bruit blanc

A la fin des chansons

le néant

(Saint-Jean, octobre 2017)


5/ Négatif des vagues

Nous avons griffonné quelques mots au hasard

jetés au vol du vent de matins sans histoires

sans en goûter le son, sans en saisir le sens

des mots d'abandon, des mots d'absence

Avec désinvolture, noircir les coins de page

le grattement fébrile d'un monstre xylophage

robot-Bilal aux circuits brouillés sous ses ailes

notre encre est son sang, bénie soit-elle

Sur le négatif des vagues

nos mots s'en remettaient au sable

Nous avons griffonné quelques mots au hasard

puis que les tourbillonnent la Vlatva ou la Loire

modestes hiéroglyphes seul le vent les lira

tirant de nos lyres un opéra


Sur le négatif des vagues

nos mots s'en remettaient au sable


(Fondettes/Notre-Dame du Puy/Saint-Jean, octobre 2018)

6/ Thiua


Souvenirs noirs, teints de noir

temps de la brume & des grands feux

nos corps se fondaient dans la nuit

Souvenirs noirs, obsidienne

pensées tracées dans la poussière

apporter du bois pour les temples

Réjouissons-nous, mes amis, enivrons-nous

enivrons-nous

que coule le vin de maguey

Souvenirs noirs, crépuscule

le vent disperse les codex

chair déchirée par les hoccos

Souvenirs noirs, teints de noir

si beaux les corps destructurés

hurlements des derniers des nôtres

Réjouissons-nous, mes amis, enivrons-nous

enivrons-nous

que coule le vin de maguey

La tristesse qui nous ressemble

apporter du bois pour les temples

la tristesse qui nous rassemble

apporter du bois pour les temples

La tristesse qui nous ressemble

apporter du bois pour les temples

la tristesse qui nous rassemble

apporter du bois pour les temples

(Fondettes/Cour-Maugis, juillet 2018)

7/ Musique obsidienne

La musique est urgence

elle est épines & aspérités

fantasmes que la pluie ravine

la musique est adolescence

Zan nipan tlalticpac

La musique est fêlure

lézard-torpeur fuyant l'apocalypse

elle est stratifiée de douleurs

elle est soleil grimant l'obscur

Zan nipan talticpac

zan nipan talticpac

La musique est violence

ses crocs de chienne à l'assaut de nos sons

strophes taillées dans l'obsidienne

bras d'honneur à la senescence

Eboueurs des académies

musiciens des petits dimanches

vous voulez la canaliser

retournez à vos eaux usées

La musique est urgence

demain sera coulé d'autre béton

quel imprévisible fracas

à mesure que la nuit s'avance

à mesure que la nuit s'avance

(Fondettes/Saint-Jean, juin 2018)

8/ Kusi Kuyllur

& toi tu restes là à compter les étoiles

tandis qu'est en lambeaux la nuit à deux cuadras

le bruit sourd de la foule aux cris de fumigène

le ciel a la jaunisse

& toi tu restes là à compter les étoiles

Fabrice à Waterloo n'avait pas moins saisi

que toi la geste folle éparpillée dans l'ombre

les crocs des édentés


& toi tu restes là à compter les étoiles

qui sont autant de bris de glace au froid reflet

sur l'asphalte écarlate & sur l'écran des casques

à la télévision

& toi tu restes là à compter les étoiles

chacune est un diamant sur ce collier jadis

au bazar d'Istanbul il te l'avait offert

ses mains étaient si douces

& toi tu restes là à compter les étoiles

tandis qu'est en lambeaux la nuit à deux cuadras

un sourire au fusain s'esquisse entre tes larmes

oh, tu rentreras tard

(2/3 février 2019, Boissy-Maugis)

9/ Opération Septentrion

J'ai cherché la maison la plus au Nord

la plus lointaine

la plus haute


mais rien qu'à la pâleur de l'horizon

on pourrait se croire banni

on pourrait perdre la raison

Nostalgie des sept filles de la Nuit

par la Bifröst brûlées

évanouies

La lune lentement monte & se vide

sur les étoiles

assourdies

Des monstres de broussaille rampent dans l'ombre

leurs os craquent sous mes pleurs

opération Septentrion


Nostalgie des sept filles de la Nuit

par la Bifröst brûlées

évanouies

leur regard de perle

Nostalgie des sept filles de la Nuit

par la Bifröst brûlées

évanouies

(Saint-Jean, 4 février 2020)

10/ L'orme mort

Un rayon brosse le Ponant

les reliefs se font plus aigus

alors que les pochoirs de rose

au soleil gelé se calcinent

La cabine ronronne

tirelire & grelotte

les récifs de brouillard

Le matin se couleuvre

dans les couloirs de boue

figés par le moins douze


C'est l'heure où le soleil fragile

hésite à installer le temps

les foyers fument sous l'écharpe

avant qu'hier ne se réplique

où lentement comme un prénom

glané au hasard des archives

un fruit jaune à l'arôme rance

le matin se fane en silence

(Trilport/Saint-Jean, 10 décembre 2013)

11/ Tromsø

In this small wooden house

we would watch the sun fade away

now I feel it'll never come back


I remember the lights

green ghosts wandering in the night

preventing us from feeling so sad

We were never afraid

of the wind wheeping endlessly

we believed we would run away


In this small empty house

there'll be nothing left of you

now I know you'll never come back


Quand tu t'en iras

un monde de neige

arpèges éteints

un crépuscule sans fin

Le bruit de tes pas

hier encore était vivace

ton parfum s'efface

cédant à la nuit & au froid

Quand tu t'en iras

Quand tu t'en iras

(Bellou/Saint-Jean, janvier-juin 2021)

Villa Solitude (2025)

1/ Leaving Diaspar (Instrumental)

2/ Heliopolis

Le jour où tout sera lumineux

nous interdirons la nuit

débarrassés de ces haineux

qui pullulent aujourd'hui

Le jour où tout sera redoré

le déclin du monochrome

à nouveau bu par les forêts

reconquérant leur dôme

& nous marcherons

vers Heliopolis

Le jour où tout sera anobli

nous dégagerons du sable

coincées sous des tonnes d'oubli

nos aventures misérables

& nous marcherons

vers Heliopolis

Nous nous serrerons la main

à Heliopolis

Boissy, juillet 2014 – revu en 2023

3/ Candlelight City

(ANOB)

Grey are the days ; dark is the night

the snow on the streets swallows the sounds

It's so cold in our house, a hell of a winter

I can't even see your eyes


We live by candlelight

fragile glimpse in the night

They thought we would freeze

but we hold out, still we breathe

Somewhere in the fields this afternoon

we heard once again one of those haunting roars

Now it's all gone quiet, a hell of a silence

but still your warmth

your arms

We live by candlelight

fragile glimpse in the night

They thought we would freeze

but we hold out, still we breathe

(Saint-Jean, 30 novembre 2022)

4/ Tvé Město I (instrumental)

5/ Edepol

Encore un peu d'espace à graviter

quelques lumières

d'imaginaire

il reste des arcanes de beauté

qui perceront les débris

On peut se moquer des enluminures

dire que l'époque

est aux cyniques

au CAC 40 aux cascades d'ordures

mais est-ce qu'on aura vécu ?

Edepol Mehercle

par le morose encerclés

Mehercle Edepol

vapeurs de mauvais alcool

Encore un peu d'espace à distribuer

pour les transfuges

d'autres déluges

sur fond de cris de menaces & des huées

on leur refuse un abri

Edepol Mehercle

par la douleur encerclées

Mehercle Edepol

les démocraties s'étiolent

Edepol Mehercle

aurions-nous perdu la clef

Mehercle Edepol

fouillons dans les herbes folles

(Porto, 14 octobre 2015 / Saint-Jean, 31 décembre 2015)


6/ Lightnings

Le grenat de la nuit

envahit les quartiers

partout la solitude

stagne comme un brouillard

étouffant tous les bruits

You have to understand

that you're a stranger here

with your sorrowful mind

& the blood in your eyes

the sadness in your heart

Trône la cathédrale

prête à nous dévorer

ses vitraux des hachoirs

ses clochers des couperets

son ombre sur les dalles

You have to understand

that no one wants you here

with your sorrowful mind

& the blood in your eyes

your sadness is a disease

A l'abri des lightnings

qui pétrifient le sable

la litanie des rues

les parkings immuables

(Saint-Jean/Bellou – janvier 2011 – janvier 2023)


7/ OKHTA-TSENTR

(Oхта Центр )

Gazprom-City, 2036

nuages loqueteux, disloqués

c'est un hoquet de soufre chassé vers d'autres cieux

Des cheminées obscènes

sèches & mortes comme la mue d'un ophidien

briquetées, carcérales

dans un crachat de poussière froide

lacèrent l'horizon

Obélisque sinistre

cyber-sarisse des plaines genées

cauchemar d'ogives

sur silence post-nucléaire

Les cercles de drones charognards

grand remplacement des oiseaux

plus de nuit, plus de pluie, plus de brouillard

seul le vent se souvient d'avant

On cherche en vain les coulées ardentes

sous le ciel de laudanum

mais rien ne subsiste

Rien n'a servi de prévenir

rien n'a servi de jérémier

rien n'a servi d'apercevoir

Les pyramides des Mayas, les monuments des Grecs et les murailles des Hittites avaient ceci d'humain qu'ils gardaient le souvenir déformé ou décoloré de la vie des hommes. Sur le sable sur la pierre, ils dessinaient losanges, tambours, alvéoles aux contours géométriquement parfaits. Leur force était brutale, mais ils siégeaient avec humanité dans le sillon du soleil, lui reconnaissant la place de maître. Ici, tout n'est que mort et désolation, comme si la terre courroucée avait vomi pour finir, dans un dernier soubresaut de désespoir, le phallus pétrifié et pustuleux des Titans condamnés. Pourtant, ce sont les hommes qui ont conçu, créé, bâti, échafaudé ces monstres qui les ont engloutis dans un ricanement mécanique.

Rien n'a servi de prévenir

rien n'a servi de jérémier

rien n'a servi d'apercevoir

Gazprom-City, 2037

désert minéral, broussaille chimique

métallomorphose

far-east dévasté

ville fantôme, neurasthénique

Tchernobyl d'outre-planète

à enfouir sous la terre

comme un secret d'inceste

& que les roseaux demain la chantent après sa mort

que les roseaux demain la chantent après sa mort

que les roseaux...

(Boissy/Saint-Jean/Reims, novembre 2009, février 2010, octobre 2022)

8/ Vndadiem ou le 21h06

Déjà fuient derrière nous

les lumières des villes

leur rougeur intranquille

bribes d'un halo fou

Fourbus des jours-serpents

gris de mélancolie

nous roulons sans un pli

vers ce coin de néant

La mer a englouti le jour

La mer a englouti le jour

Puisque quoi qu'on y fasse

son incarnat nous glace

puisqu'elle nous enveloppe

contentons-nous de la nuit

& sur les recoins laqués

d'un restaurant chinois

mon regard s'était givré

pressé de s'enivrer

pour échapper à la poix

pour échapper à la poix

L'ennui est si palpable

ses atomes griffus

visibles à l'oeil nu

le temps si intraitable


Déjà fuit derrière nous

cet étrange délire

que sont les souvenirs

la nuit absorbe tout


La mer a englouti le jour

La mer a englouti le jour

Puisque quoi qu'on y fasse

son incarnat nous glace

puisqu'elle nous enveloppe

contentons-nous de la nuit

Merserat unda diem

Merserat unda diem

Entre les pages flétries

des ornements de Claudien

je rêvai de la Trinacrie

ou de n'importe quel lointain

pour ourler le quotidien

pour ourler le quotidien

Merserat unda diem

Merserat unda diem

(Train Montparnasse/Nogent-le Rotrou, 24 novembre 2016)

“N+8” - textes.

Selinofilimeni

(musique : Frédéric Gerchambeau/Bruno Vigneux – paroles : Bruno Vigneux)

Embrassée par la lune

enlacée par la nuit

les yeux sertis de souvenirs

tu sais quand on vivait

Embrassée par la lune

sous d'étranges lumières

était-ce toi dans ce halo

je ne saurai jamais

Je crois qu'ils sont jaloux

de nous voir nous aimer

ils sont encore plus gris qu'avant

leur pardessus ruisselle

Leurs SUV vrombissent

terrifiés par l'éclipse

la pluie n'a plus aucun secret

tout n'est que tourbillon

Embrassée par la lune

& plus si affinités

explosion de vos corps célestes

vous voilà deux déesses


(St-Jean, août/septembre 2021)


Nachtseelen

(musique : Frédéric Gerchambeau/Bruno Vigneux – paroles : Bruno Vigneux)

Nachtseelen

s'estomper dans la Nuit Bleue

la mer vineuse

le chaos qui rassure

Est-ce un rêve

car le silence est total

les étoiles

vangoghent l'horizon

Nachtseelen

voguer dans le ciel cobalt

l'altitude

a figé nos synapses


J'ai eu si peur

j'ai eu si peur que la nuit cesse

J'ai eu si peur

j'ai eu si peur de te perdre

J'ai eu si peur

j'ai eu si peur que la nuit cesse

J'ai eu si peur

j'ai eu si peur de te perdre

au matin

Dans le froid de l'espace

je flottais minéral

les souvenirs s'effacent

& le temps cannibale

Je froisse mes lyrics

je les lègue au néant

aux tempêtes cosmiques

au Sagittaire béant

Dans le froid de l'espace

je flottais minéral

les souvenirs s'effacent

& le temps qui m'avale

(Saint-Jean, 18 janvier 2022)

Nat og Dag

(musique : Frédéric Gerchambeau / Bruno Vigneux – paroles : Bruno Vigneux)

Nat og Dag – Nat og Dag

Nat og Dag – Nat og Dag

I don't know where I am

I don't know where I belong

I don't know what to do

should I just have some coffee ?

I don't know what is wrong

with all the things I try so hard

with all the things I do

I don't want to participate anymore

nothing makes any sense

any sense

confusion Night & Day

I don't know what to say

to all those snowy grey people

they seem to wait for me

as if I had the answers

but I have none

I wander Night & Day

any sense

confusion Night & Day

Nat og Dag – Nat og Dag

Nat og Dag – Nat og Dag

I do nothing but writing

Night & Day

Millions of sounds millions of notes

Night & Day

I hear rhythms & melodies

Night & Day

I do nothing but writing

Night & Day

Millions of notes millions of sounds

Night & Day

I hear rhythms & melodies

(Saint-Jean, 19-20 janvier 2022)

Las Ilusiones” - textes.

Osijek

(Tournesols prosternés)

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Au bord le long ruban des tournesols prosternés

océan olympien que laminent les averses

le défilé des champs sous le brouillard araignée

le reflet des cigognes aux pointillés des fenêtres


A mesure que le train oscille vers Osijek

A mesure que le train oscille vers Osijek

Dépasser les arpents de tournesols prosternés

blessés, couchés, vaincus par des litres de tristesse

des façades oubliées voilant la délicatesse

comme commémorant ce qu'on ne peut pas soigner


A mesure que le train oscille vers Osijek

A mesure que le train oscille vers Osijek

Le stylo a rippé, renonçant à écrire

la pluie & le brouillard ont pompé l'encre à sec

le ciel abandonné lentement se déchire

à mesure que le train oscille vers Osijek

(Osijek/Samobor/Zagreb/Rijeka, 16-20 juillet 2016)

Vlak !

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Tout est intact

La pluie qui délave les gares

les wagons rouillant sur le quai

au fond de rames désertées

des grafs dont le sens s'est perdu

Sous un ciel gris d'estampe

dans le silence des souffleries

Vlak ! Tout est intact

Tout est intact

Les rues plus noires que l'hiver

qu'on déambule à perdre pied

sifflant son Brel entre les flaques

à la main un bouquet fané

La solitude rampe

dans le silence des souffleries

Vlak ! Tout est intact

Tout est intact

Le lit si blanc qu'on croirait Dieu

le premier de ces longs adieux

des maisons vidées de leur chair

des mains qui ne sont plus que tièdes

La folie sous les tempes

dans le silence des souffleries

Vlak ! Tout est intact

(Varazdin/Koprivnica, 16 juillet 2016)

Nébuleux software

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Nanti m'affirmaient-ils

tes clics de bric & de broc

oublie ton bloc-terrier

parmi la fumée de l'écran

Ainsi passent les nuits

haschich du casque virtuel

assassin de mes jours

Hakem m'achève en première aube

Mon cerveau monte en neige

aspiralé de pixels

congélation des muscles

maître du nébuleux software

Nanti m'affirmaient-ils

tes clics de bric & de broc

oublie ton bloc-terrier

parmi la fumée de l'écran

Nanti m'affirmaient-ils

avant que je ne les perde

dans le nuage-hüzün

où j'ai usé mes rêves

(Saint-Jean, 11 novembre 2017)

Rebooting clouds

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Ciel lourd, envahi d'électrons

bouilli par décembre

nuages à l'amble

Frontière annexée par l'hiver

suintant mélancolie

Rebooting clouds

all along the way

Rebooting clouds

the saddest of days

Censure – que les gens se rassurent

chacun est à sa place

les haillons sous les néons glacés –

Ciel lourd comme le regard des hommes

assis la main tendue

bravant le vibrato de Tino Rossi –

Rebooting clouds

all along the way

Rebooting clouds

the saddest of days

Rebooting clouds

all along the way

Rebooting clouds

the saddest of days

L'horizon se craquèle tel une banquise

il frappe halogène Santa & ses rennes

Demain, les nuages auront bouffé l'angoisse

Demain, peut-être, un soir de fête

(Fondettes/Saint-Jean, fin décembre 2017 – début janvier 2018)

Víctor, victorieux

(à Víctor Jara, 1932-1973)

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Programmés pour ne jamais se taire

pour être la voix face au vent

les doigts rivés sur leur guitare solaire

ils ont fait de la nuit un rêve éclatant

Victorieux les poètes

de combats sans trêve

n'en font qu'à leur vilaine tête

aux si puissantes lèvres

Qu'on les jette à l'oubli du désert

qu'on les ravage au fer blanc

les doigts même brisés s'agitent au vent

les poings restent levés porteurs de colère

Victorieux les poètes

de combats sans trêve

n'en font qu'à leur vilaine tête

aux si puissantes lèvres

(Saint-Jean/Fondettes, fin décembre 2017- début janvier 2018)

Medialuna

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Chiens lunaires, monstres-vigognes

dans la chaleur binaire qui décortique & qui cogne

les champs de pierre bise

Collusion de débris rocheux

complotant l'explosion, arc-en-ciel vertigineux

en bouts de terre promise,

météore, poussière brune,

terreau du sang des mots éparpillé sous la lune,

des souffrances passées

Chients démons, monstres-nandous

reniflant le limon d'antédiluviennes boues

Le ciel s'est abaissé

J'irai égarer mes heures sous la Medialuna

Medialuna – Medialuna

aux cris de San La Muerte, de la Mulanima

- reflets dans mon café

Medialuna – Medialuna

Demi-astre, quart de soleil

cautérise le désastre & éblouit de merveille

le spleen européen

Chiens fantômes, monstres-condors

azuleros du dôme ou dort encor El Señor

son sommeil surhumain

J'irai égarer mes heures sous la Medialuna

Medialuna – Medialuna

aux cris de San La Muerte, de la Mulanima

- reflets dans mon café

Medialuna – Medialuna


Mais quoi de mieux qu'une légère ivresse

la lenteur du pisco faisant écho aux sables

écarlates des canyons où le temps étale sa paresse

la quebrada sans nom, sans horizon véritable ?

Medialuna – ton pâle éclat

Autour de moi – Medialuna

Chiens lunaires, monstres-vigognes

sous un ciel adultère qui décortique & qui cogne

le désert insatiable


enracinent, saignant des crocs,

la vapeur des machines au milieu des San Pedro

dans leur nocturne fable

Mais quoi de mieux qu'une légère ivresse

la lenteur du pisco faisant écho aux sables

écarlates des canyons où le temps étale sa paresse

la quebrada sans nom, sans horizon véritable ?

Mais quoi de mieux qu'un croissant crevant la nuit

pour oublier sa peine au sortir de l'hiver?

Tout est fossilisé dans cet obscur circuit

où les monstres-vigognes chassent les chiens lunaires

Medialuna – ton pâle éclat

Autour de moi – Medialuna

(Saint-Jean/Fondettes, avril 2012-novembre 2016)

Fernweh

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Le désir de partir

la soif d'un autre horizon

sans raison que d'être ailleurs & vivant

échapper à l'hüzün

en escaladant les dunes

contempler à l'infini l'océan

les lacets des rivières

jamais lassés des cratères

des forêts des plaines & des déserts

Le désir de partir

si fort qu'on croit défaillir

embolie du ciel gris de l'automne


aussi loin que nous portent les vents

aussi loin que nous portent les vents

aussi loin que nous portent les vents

aussi loin que nous portent les vents

Le désir de s'enfuir

pour compléter l'horizon

sans maison que l'air glacial de la steppe

rencontrer les humains

au regard fier & lointain

les mains tannées cramées comme de vieux ceps

aussi loin que nous portent les vents

aussi loin que nous portent les vents

de la foule au regard ensablé

aussi loin que nos pas l'ont rêvé

(Boissy/Saint-Jean, décembre 2016)

Chant de Nezahualcóyotl

(paroles : Nezahualcóyotl Alcomitzli –

musique : Bruno Vigneux)

Niuinti, nichoka, niknotlamati,
nik mati, nik itoa,
nik ilnamiki :
Ma ka aik nimiki
ma ka aik nipoliui.
In kan ajmikoa,
in kan on tepetiua,
in ma onkan niau...


Ma ka aik nimiki,
ma ka aik nipoliui.


(domaine public)


Traduction française :

"Je suis ivre, je pleure et me tourmente

Je pense, et me parle, et me dis en moi-même :

Si la mort jamais ne venait

Et si j'étais sûr de ne jamais disparaître ?

Là où la mort n'existe pas

Là où elle est réduite à merci

C'est là-bas que je m'en vais".

Si la mort jamais ne venait

Et si j'étais sûr de ne jamais disparaître ?

(Pascal Coumes et Jean-Claude Caët)

Nuevo Eden

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

Il faut garder ce rêve

sur les chemins de sable stérile

que repousse la forêt

le ciel des traînées de minium

Il faut garder ce rêve

de nos maisons rouillées par la pluie

pourries par l'incertitude

face au vent trempé de l'enfer

le conserver intact

précieux comme un filon d'utopie

qu'il maintienne en vie nos fils

le ciel des traînées de minium

Tu sais, là-haut, sur la route endiablée

les camions viendront nous sauver

quand le torrent sera sec

quand sera guérie la tempête

Il faut garder ce rêve

oublier que nous fûmes heureux

nous avions l'eau & le feu

des murs & un toit sur nos têtes

Ici la terre est grise

parfois rouge du sang des géants

c'est le règne de la boue

le ciel des traînées de minium


Tu sais, là-haut, sur la route endiablée

les camions viendront nous sauver

quand le torrent sera sec

quand sera guérie la tempête

un jour, peut-être

(Saint-Jean, 28 août 2018)

Calopsittes

(Paroles et musique de Bruno Vigneux)

Seul comme un grain de sable

au milieu de ses semblables

rêvant à la fin des temps

d'un bleu éclatant


Drogué par le smog des nos années de granit

pépite encore le sifflement des calopsittes

pâle éclat d'une étoile aux confins des cris de guerre

Quand on aura bouffé la terre

leurs chansons seront requiem

Reste à l'abri des bombes

corbeau parmi les colombes

ton havre un bunker de paille

sourd à la grenaille


Drogué par le smog de nos années de granit

résiste encore le cliquetis des calopsittes

fier & dernier éclat la joie défiant la misère

Quand on aura bouffé la terre

leurs chansons seront requiem

(Boissy/St-Jean, 5-7 septembre 2015)

Matamore

(paroles et musique de Bruno Vigneux)

J'ai pas peur du silence

j'ai pas peur de ces longs instants

vivement

le sifflement du train


Je tourne en rond

dans un hasard capitonné

il faut soudain que le café

glisse un glouglou rassurant

Je m'épisode

le ciel a perdu sa couleur

un lointain grognement d'avion

remplit les interstices

J'ai pas peur du silence

j'ai pas peur de ces longs instants

vivement

le sifflement du train

J'ai pas peur du silence

j'ai pas peur de ce bruit incolore

vivement

un coup de téléphone

(Trilport, 15 novembre 2014 – Boissy, 16 août 2016)

La noche se achaplina

(instrumental - musique de Bruno Vigneux)


“Las Ilusiones” - English lyrics.

Osijek

Beside long strips of bowed down sunflowers

Olympian ocean laminated by showers

Narrow ways of fields under the spider sun

Reflection of storks at windows' stippling

As the train oscillates to Osijek

As the train oscillates to Osijek

To overtake the acres of bowed down sunflowers

Wounded, taken down, vanquished by litters of sadness

Of forgotten facades veiling the sweetness

like commemorating what you cannot heal

As the train oscillates to Osijek

As the train oscillates to Osijek

The pen ripped, unwilling to write down

Rain and fog dried all the ink out

The forsaken sky slowly tears itself apart

As the train oscillates to Osijek

As the train oscillates to Osijek

Vlak !

Vlak !

All is intact

Rain that washes out stations

Rusting wagons on the docks

Down the deserted carriages

Meaningless graffitis

Under the etching-grey sky

Between the blowers' silence

Vlak ! All is intact.

All is intact

Streets darker than winter

Streets you wander through to be lost

Whistling Brel' songs between the puddles

A withered bunch at hand

Solitude is crawling

Between the blowers' silence

Vlak ! All is intact.

All is intact

A bed so white you think it's God

The first of these long goodbyes

Houses with no more flesh

Hands that are no more than lukewarm

Madness under temples

Between the blowers' silence

Vlak ! All is intact.

Nébuleux Software (Cloudy Software)

Affluent man they said to me

With your randomly clicks

Forget your block hole

Amidst the smoke of the screen

Thus pass my nights

Hashish of the virtual helmet

Assassin of my days

At first light Hakem kills me

My brain is whipped up

In pixels' spirals

Freezing of the muscles

Master of the Cloudy Software

Affluent man they said to me

With your randomly clicks

Forget your block hole

Amidst the smoke of the screen

Affluent man they said to me

Before I lost them

Down in the hüzun-cloud

Where my dreams were worn out

Rebooting Clouds

Heavy sky

Invaded by electrons

Boiled by December

Ambling clouds

Frontier

That winter annexed

Weeping melancholy


Rebooting clouds

all along the way

Rebooting clouds

the saddest of days

Censorship

Let people be reassured

Everyone stays at their place

(Rags under frozen neons)

Heavy sky

Like the look on the face

They have when they beg

(facing Tino Rossi's vibrato)

Rebooting clouds

all along the way

Rebooting clouds

the saddest of days

The horizon is cracked

Like an ice floe

Its halogen light strikes

Santa and his reindeers

Tomorrow clouds will have eaten anguish

Tomorrow, maybe : a party night

Víctor, victorieux (Víctor, victoriousdedicated to Víctor Jara 1932-1973)

Programmed never to be silenced

To be the voice facing the wind

Fingers attached to their solar guitar

They transformed the night into a dream

Victorious poets

Of never ending fights

Naughty them doing whatever they want

With their powerful lips

You can throw them in forgotten deserts

Devastate them with tinplate

Their broken fingers still wave in the wind

Their fists still stand with anger

Victorious poets

Of never ending fights

Naughty them doing whatever they want

With their powerful lips

Medialuna

Lunar dogs, vicuna monsters

In the binary heat that peels and bangs

Fields of brown rocks

Collusion of rocky debris

Ploting the explosion, vertiginous rainbow

At the end of the promised land


Meteor and brown dust

Bloody ground of words scattered under the moon

From past sufferings

Devil dogs, rhea monsters

Smelling antediluvian mud & silt

The sky has lowered down

I will loose my hours under the medialuna

At the sound of San La Muerte and the Mulanima screaming

Reflecting in my coffee

Half star, quarter sun

They cauterize disaster and dazzle with wonders

European' spleen


Ghost dogs, condor monsters

Azulejos from the dome where El Señor still sleeps

His superhuman sleep

I will loose my hours under the medialuna

At the sound of San La Muerte and the Mulanima screaming

Reflecting in my coffee

What is better than a slight drunkenness

Pisco slowly echoing canyon-red sands

Where time spreads out its laziness

Quebrada with no name, with no real horizon ?

Medialuna – your dim light

Medialuna – all around me

Lunar dogs, vicuna monsters

Under an adulterous sky that peels and bangs

A voracious desert

Rooting with bloody fangs

Steaming machines amidst San Pedros

In their nocturnal tales

What is better than a slight drunkenness

Pisco slowly echoing canyon-red sands

Where time spreads out its laziness

Quebrada with no name, with no real horizon ?

What is better than a crescent bursting the night

To forget your sorrow at the end of winter ?

All is fossilized in this dark circuit

Where vicuna monsters hunt lunar dogs

Medialuna – your dim light

Medialuna – all around me

Fernweh

The will to leave

The thirst of new horizons

With no reasons but to be alive somewhere else

Escaping hüzün

Climbing the dunes

Endlessly watching the ocean

Rivers' switchbacks

Never tired of craters

Forests, plains & deserts

The will to leave

So strong you think you might faint

Autumn's grey sky's embolism

As far as the wind take us

The will to run

To complete the horizon

With no house but freezing steppes' air

To meet humans

With their proud distant eyes

Hands tanned & burned like old vine stocks

As far as the wind take us

Far away from the sand stuck crowd

As far as our steps have dreamed of

Chant de Nezahualcóyotl (Song of Nezahualcóyotl)

I am drunk, I cry, I torment myself

I think, I talk to myself, saying :

"If death was never to come

If I were sure not to disappear ?

Where death does not exist,

Where it it reduced to ashes,

This is where I will go".

If death was never to come

If I were sure not to disappear ?

(Original poem written in nahuátl by Nezahualcóyotl, 1402-1472).

Nuevo Eden

You have to keep this dream

On paths of sterile sand

Let the forest grow again

Sky like traces of minium

You have to keep this dream

Of our houses rusted by the rain

Rotten by incertainty

Facing hell's wet wind

Keep it intact

Precious like a lode of utopia

Let it keep our sons alive

Sky like traces of minium

You know, up there

Up in this hellish road

Trucks will be coming to save us

When the torrent runs dry

When the tempest is cured

You have to keep this dream

Forget that we were happy

We had fire and water

We had walls, we had a roof above our heads

Here the land is grey

Sometimes red from giants' blood

Here is the reign of mud

Sky like traces of minium

You know, up there

Up in this hellish road

Trucks will be coming to save us

When the torrent runs dry

When the tempest is cured

Maybe one day

Calopsittes (Cockatiel parakeets)

All alone like a grain of sand

Amidst fellow humans

Dreaming of the end of times

Blazing blue

Drugged by our years' smog, those granite years

The parakeets still peep

Dimly shining star at the borders of war screams


When we have eaten Earth up

Their song will be requiem

Stay safe from the bombs

Crow amidst the doves

Your refuge is a straw bunker

Deaf to the shots

Drugged by our years' smog, those granite years

The parakeets still resist

Proud last shining joy facing misery

When we have eaten Earth up

Their song will be requiem

Matamore (Braggart)

I'm not afraid of silence

I'm not afraid of these long moments

Can't wait for hearing the train whistling

I go round in circles

Randomly padded

Suddenly coffee has to make

Its comforting gobble

I incident myself

Sky has lost its colors

In the distance a plane is growling

Filling the cracks

I'm not afraid of silence

I'm not afraid of these long moments

Can't wait for hearing the train whistling

I'm not afraid of silence

I'm not afraid of this colorless sound

Can't wait for a phone call

All music and lyrics : Bruno Vigneux

(except where indicated).

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